Kurtville - Erlend Loe

Kurtville

De Erlend Loe

Traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud

Illustré par Kim Hiorthoy

La Joie de Lire – juin 2011

8,50 euros

Kurt et sa petite famille (la mère Anne-Lise, les enfants Héléna, Kurt-Soda et Bud) partent en vacances. Après tirage au sort, ils vont visiter la Finlande et la Vallée de Moumine. Mais Kurt s’endort au volant du Fenwick et, après quelques semaines de dérive sur une rivière, ils atterrissent à Kurtville. Christine Sado y dirige la Congrégation Ping-Pong, une communauté religieuse qui vit de la vente de ces tables de tennis entre deux prières déchaînées. Christine Sado recherche justement un nouveau pasteur, le précédent ayant été arrêté par la police. Ce sera Kurt, qui se glisse avec une aisance terrifiante dans ses nouveaux habits de berger. Cantonnée au crochet, Anne-Lise se rebiffe.

Le Kurt raciste de Kurt a la tête en cocotte-minute (La Joie de Lire, 2009) faisait un peu peur, ne convainquait pas totalement le lecteur perdu dans un x-ième degré d’humour. Maintenant que le principe du héros repoussoir est entendu, Kurtville sur les sectes passe mieux. Ca commence dès les pommes de terre norvégiennes censément plus propres que les finlandaises, ça continue avec l’attrait de la flatterie et celui irrépressible du pouvoir. Seul le coup sur la tête qu’il reçoit, le rendant un peu fou, réhabilite l’attitude simplette pour ne pas dire bornée de notre conducteur de chariot élévateur transpalette.

Anne-Lise reste la voix de la raison et de la citoyenneté qui ramène finalement son homme influençable à des sentiments plus équilibrés. Quoique, cette fois-ci, elle affirme à plusieurs reprises son intention de jeter l’éponge. Le phénomène sectaire a donc bien failli avoir raison de Kurt, preuve de sa dangerosité. Il aurait été dommage que le héros s’effondre, pourtant, tant cette série détonne en littérature jeunesse dans sa façon limite de traiter des maux de notre société.

« Hahahahahaha ! rit le professeur. Vous croyez vraiment que Jésus et le Saint-Esprit ont la ferme intention de laisser notre terre se réchauffer jusqu’à ce qu’elle devienne inhabitable ? Loin de là. C’est Jésus qui contrôle tout. Si la température baisse ou monte de quelques degrés, c’est parce que Jésus l’a décidé. S’il a froid, il monte la température. Inversement : s’il transpire, il la baisse. Ce n’est pas plus grave ni plus compliqué que ça. Des questions ? » (p. 112)

(Après quelques hésitations, je range maintenant Kurt dans la catégorie Ados. Si les premiers étaient accessibles à tous, l'humour devient de plus en plus subtil...)