3000 façons de dire je t'aime
de Marie-Aude Murail
Ecole des Loisirs – collection Medium – 2013
Camarades d'école, Chloé, Bastien et Neville se côtoient depuis l'enfance. Leurs énormes différences de caractère ne les empêchent pas d'avoir développé, à l'issue d'une expérience de club théâtre, un même goût pour la scène. Chacun de leur côté, ils cultivent un jardin secret de tirades et de passions. Après le baccalauréat, ils se retrouvent au conservatoire, dans le cours de monsieur Jeanson. Une belle amitié va naître, faite d'ambiguïté amoureuse et de soutien mutuel.
Marie-Aude Murail, c'est toujours une verve, une chaleur humaine, un humour aussi devant l'adversité, enfin un goût pour les belles petites choses de l'existence qui fondent une ambiance, partie intégrante de l'histoire, et point de départ autant que d'arrivée. Ici, à travers la thématique si riche du théâtre, trois adolescents vont découvrir que la vie est peut-être une illusion, mais qu'elle vaut largement la peine d'être vécue.
Chloé est le type de l'élève modèle en classe préparatoire, qui aspire à souffler et peut alors mentir à ses parents en arguant d'un exposé sur la pêche à la morue en Hollande au XVIIème siècle. Bastien s'accapare la figure du faux boute-en-train qui cache des blessures derrière le rire, cependant suffisamment fort pour tracer son bonhomme de chemin. Neville représente le torturé, « le ténébreux, le veuf, l'inconsolé » et le dé-scolarisé pour qui le théâtre sera la planche de salut. Evidemment, chacun se verra confier des rôles à son aune, creusant ainsi un peu plus sa personnalité.
Le temps passe autour de la préparation d'un concours d'entrée au Conservatoire de Paris. Le professeur, Jeanson, se centre sur Neville, son poulain, et « utilise » Chloé et Bastien pour l'accompagner. Pas dupes, les deux jeunes gens vont jouer le jeu, tant leur relation à trois leur est précieuse. Un chassé-croisé amoureux s'organise autour de Chloé (la rougissante) mais aussi entre Neville et Bastien. Le tout bien sûr raconté d'un ton alerte et fin, aussi primesautier qu'un Beaumarchais.
Si la construction est linéaire, la narration m'a séduite, passant insensiblement et dans la même page d'un « nous » dont on ne sait qui en est à l'origine (quelle importance tant le trio est proche ?) à un procédé externe plus classique, mais qui garde la saveur de la proximité de ce « nous ». Un petit bonheur idéalement publié pour la rentrée scolaire, et qui illuminera les journées d'automne.