Coldtown, cité des vampires
de Holly Black
traduit de l'américain par Luc Rigoureau
Hachette – collection Black moon - 2013
Dans le monde de Tana (quasi le nôtre), les vampires occupent le devant de la scène, même confinés dans des enceintes aux abords des villes, les « zones froides ». Ils fascinent, ils attirent les jeunes gens ou bien ils font peur, à mordre sans tuer, à disperser un virus vampirique duquel il est extrêmement difficile de guérir. Mais, en dépit d'un passé douloureux, la vie de Tana reste toute simple, jusqu'à cette fête dont elle se réveille seule rescapée de buveurs de sang, ou presque. Brave fille, elle va en effet sauver son ex-petit ami, infecté, et un vampire à la beauté irréelle, dont il s'avère qu'il joue un rôle très important parmi les siens. Peut-être atteinte elle-même, Tana conduit Aidan et Gavriel à Coldtown, la plus grande des zones froides. S'ils y rentrent, c'est sans doute pour ne pas en ressortir...
Le retour des vampires, armés de facultés pour le moins traditionnelles, mais aussi parfaitement adaptés à notre société de communication : ils filment leurs exploits, tweetent leurs journées, sont les nouvelles célébrités d'une jeunesse aussi fascinée par l'interdit qu'aujourd'hui. On veut les imiter, on veut être eux. A rebours, Tana aimerait se tenir à distance de ce système qui lui rappelle la perte, ou plutôt la transformation de sa mère en vampire.
Bien sûr, elle va se retrouver plongée dedans jusqu'au cou (jusqu'au croc ?), et ce faisant montrer son caractère non pas forcément courageux, mais profondément pragmatique. Elle veut sortir son petit monde (elle, Aidan, bientôt sa jeune sœur) des pièges de Coldtown, ne va peut-être pas réussir, mais ne ménagera pas sa peine. Un léger humour, très fin, s'ensuit et happe le lecteur. Holly Black possède cette écriture un brin décalée, un peu décapante, qui renouvelle le topique avec souvent une noirceur assumée. Un sérieux roman, avec ou sans suite, par ailleurs impeccablement traduit par Luc Rigoureau.