Je vous écrirai

de Paule du Bouchet

Gallimard jeunesse – collection Scripto – 2013

Au milieu des années 1950, Malia quitte ses parents, gens frustes mais (trop) aimants pour étudier la philosophie à la Sorbonne. Elle habite avec une amie d'enfance, la fille de la patronne de sa mère, qui était employée de ménage. Pour Malia, une nouvelle vie s'annonce, faite de grands discours, de débats d'idées, de communisme, de théâtre russe. Elle se lie avec un metteur en scène beaucoup plus âgé qu'elle, qui remplace un peu son père, juste décédé. Pendant ce temps, sa mère se morfond à Bures-sur-Yvette, et, seule, perd pied avec la réalité. Fusionnelle, elle ne cesse d'écrire des lettres désordonnées à sa fille, qui s'inquiète mais ne veu pas abandonner ses études, ses nouvelles relations. Jusqu'au jour où l'irréparable se produit...

Des lettres entre Malia, son amie Gisèle, sa patronne Nina (la jeune fille garde des enfants), sa mère évidemment, et bientôt le metteur en scène Nicolas reconstituent l'action et son inexorable avancée. Une narration externe de faits (mais écrite avec passion) les complètent, d'abord composée de souvenirs – l'enfance de Maila, ses origines... - puis se glissant dans le présent. On pense à Annie Ernaux quand Malia évoque sa presque « honte » d'une mère si peu lettrée. Apaisés par Gisèle et Nina, les atermoiements de l'héroïne sont décrits avec une nuance et une sensibilité rares qui font toute l'émotion juste du roman.

Et puis Paule du Bouchet invente un secret de famille que j'ai trouvé un peu facile : quelle était la probabilité que Malia fasse le lien entre sa naissance et sa vie parisienne ? Reste alors cette capitale effervescente, ce bouillonnement culturel, ce contexte politique (Guerre d'Algérie) que nous sentons préfigurer les révolutionnaires années 1960. Un récit romanesque à la fois lointain et proche de nous, un morceau d'Histoire à faire découvrir aux adolescents d'aujourd'hui (à partir de 15/16 ans).

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