Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les riches heures de Fantasia
29 mai 2013

Plus tard je serai moi - Martin Page

Plus tard je serai moi

de Martin Page

Rouergue – collection DoADo – 2013 

Etrange hypothèse de départ pour ce roman – mais Martin Page est un habitué du rebrousse-poil - : Séléna, jeune fille équilibrée, enfant unique d'un couple uni et aisé, bonne élève sans effort, se voit brusquement projetée dans un avenir d'artiste maudit par ses parents. Soucieux de laisser leur fille s'épanouir, ces derniers ont en effet décidé de la mettre en garde contre la voie d'un cursus tout tracé du type avocat/médecin. Et ils sont prêts à tout pour développer les atouts de leur progéniture. Cela passera donc de l'achat de quinze kilos de glaise aux cours de piano, jusqu'à l'arrêt du chauffage en plein hiver (c'est bien connu, une jeunesse difficile favorise la créativité). D'abord flattée de voir qu'on s'intéresse à elle, Séléna finit par s'agacer et se réfugie volontiers chez sa meilleure amie Vérane. Cette dernière sait depuis toute petite qu'elle veut devenir astrophysicienne, et Séléna l'envie. Peu à peu, notre héroïne va non pas trouver sa voie – artiste n'est définitivement pas son truc – mais réfléchir à une construction personnelle. Et l'enfant devient adulte...

Court roman farfelu raconté par un narrateur externe, Plus tard je serai moi regorge d'un humour fin, pince-sans-rire, qui joue du contre-pied systématique sur une écriture très tranquille. Au début, Séléna apparaît comme l'adulte responsable qui laisse passer la crise de ses parents quarantenaires. Puis le lecteur se rend compte qu'elle était quand même bien une enfant, sur-protégée, évoluant dans un milieu social favorisé, et que ce petit épisode va sans doute lui permettre de prendre son indépendance, de plonger dans son futur. Bref, en moins de cent pages et l'air de rien, avec des petits détails très réalistes mais inattendus (le principal qui joue de la guitare rock, l'habitation dans l'ancienne boucherie) et d'autres volontairement outrés pour faire rire (les parents qui font semblant d'être alcooliques), l'histoire en dit beaucoup sur ce temps décidément pas simple de l'adolescence. A lire à partir de 15 ans pour apprécier le second degré constant ! 

IMG_7934

Quelques extraits : 

« Séléna eut l'impression que son père se représentait le désir artistique comme une sorte de lion qui vivrait au fond de son âme. Elle avait envie d'envoyer balader ses parents. Néanmoins, comme elle était une fille polie et attentive, elle sourit. D'une certaine manière, c'était touchant. Ils étaient un peu dérangés, mais ils essayaient de bien faire. » (p. 26) 

« Les parents mettent une énergie insensée à bien faire, à éduquer leurs enfants, et à s'angoisser pour eux. Séléna pensa que s'ils dépensaient un quart de cette énergie dans leur propre vie et dans leur couple, alors les choses iraient mieux à tous les niveaux. Et si elle-même attachait moins d'importance à ce qu'ils disaient et pensaient, sa vie serait plus douce. Ce serait se faire un cadeau à elle-même. » (p. 52) 

« Séléna ne savait pas exactement qui elle était, ni ce qu'elle allait devenir. Mais elle savait avec certitude que le seul travail qu'elle voulait faire, c'était être elle-même. Ce serait ça son métier.Et ce serait un chemin personnel. » (p. 70) 

Publicité
Publicité
Commentaires
Les riches heures de Fantasia
Publicité
Les riches heures de Fantasia
Publicité