La Cité tome 2 : la bataille des Confins

La Cité tome 3 : le pacte des Uniques

De Karim Ressouni-Demigneux

Rue du monde – 2012 

Contrairement à ce que j’avais compris à la lecture du premier ouvrage, cette série comportera cinq tomes. De quoi largement développer une multitude de thèmes qui dépassent d’ailleurs le cadre simple des jeux vidéos et de la (supposée dangereuse) confusion réel/virtuel. Cette thématique, c’est le premier tome qui se chargeait de l’introduire, même si elle continue à courir par la suite.

Dans le deuxième tome, Thomas/Harry n’est plus le seul à s’exprimer, Polly/Liza le rejoint. A travers elle, un pas va être franchi : la jeune fille est sans cesse en conflit avec sa mère qui l’élève seule, et, grâce à une série d’indices très très étranges (des pages blanches à passer au révélateur photographique, l’histoire d’Hugo et Juliette Drouet…), elle va enfin comprendre dans le jeu le mystère de ses origines. Parallèlement, un groupe de joueurs se rassemble pour aller explorer les limites du gigantesque univers qu’ils arpentent. Ils se rapprochent d’une sorte de cimetière où sont parqués les joueurs inactifs depuis longtemps, et découvrent rien de moins que d’agressifs zombies… Bref, ils comprennent qu’on leur cache des choses, et ce n’est pas le tome trois qui va faire avancer le schmilblick – ou si peu.

Cette fois-ci, les deux narrateurs sont rejoints par Elena/JC. Au début, je me suis un peu moquée de ces petits logos destinés à faire comprendre qui parle, et puis, à l’usage, ils se sont avérés fort utiles, puisque chaque personnage navigue lui-même sans cesse entre sa place dans le jeu et son quotidien dans notre monde. Le petit groupe d’amis tente clairement de saisir quel est le but final de la Cité, et des rumeurs font rage à propos de neurobiologistes employés par l’entreprise qui a créé le jeu… Quelques joueurs (mais sont-ce bien des joueurs ?) proposent à l’ensemble des participants de fusionner pour ensuite reprendre son intégrité mais avec le corps moyen et les pouvoirs cumulés de tous les autres. L’idée emballe la majorité, fait se méfier certains, dont évidemment nos héros.

Sur une écriture pourtant limpide, l’ensemble est excessivement touffu, construit avec des croisements multiples, rempli de fausses pistes (ou pas encore révélées… je pense à la présence constante des livres de Tolkien, à celle en filigrane flottant de la magie, etc) qui embrouillent le lecteur parfaitement subjugué. J’ai lu rapidement ces deux livres, certes parce que j’étais très intéressée, mais aussi parce que je sentais une nécessité à ne pas perdre le fil et donc la saveur !

Paradoxalement, il n’y a définitivement rien de neuf dans les sujets abordés par l’auteur, et c’est la façon un peu symbiotique de les mettre en œuvre qui les rend frappants. A partir de la thématique attendue « jeu vidéo », on flirte non moins classiquement avec la psychologie familiale, on lorgne vers la question identitaire, on réfléchit à la notion de groupe et de confiance, on ouvre une brèche à la Big Brother… La Cité n’est pas vraiment un microcosme social, mais tout se passe comme si elle révélait nombre de problématiques adolescentes (il est admis que les joueurs sont principalement des jeunes gens), tout en ayant aussi à voir avec la notion de pouvoir – sans nul doute perverti. Au final, ça fonctionne très très bien, et j’ai hâte de lire les tomes suivants !

2012-12-22 16