L'Herbier des fées - Benjamin Lacombe et Sébastien Perez
L'Herbier des fées
de Benjamin Lacombe et Sébastien Perez
Albin Michel jeunesse – octobre 2011
28 euros
Trois petites fées et puis s'en vont...
S'en aller, c'est ce qui arrive au botaniste Aleksandr Bogdanovitch, littéralement happé par la forêt de Brocéliande. En pleine Première Guerre Mondiale, Raspoutine charge le scientifique de collecter des plantes vertueuses. Mieux que cela, le professeur découvre à Brocéliande que des petits êtres vivants habitent dans les végétaux, et décuplent leurs propriétés. Décontenancé, notre homme reste rigoureux ; il dessine, fait sécher, expérimente, commente avec objectivité. Mais au fur et à mesure de ses « rencontres », il va perdre pied, et se fondre dans la nature... Ses lettres à Raspoutine et à sa femme s'espacent, son carnet d'observations prend un ton affectif. Face à un nouveau monde minuscule, Aleksandr vit sa propre guerre intérieure.
Sur cette atmosphère magique et comme auréolée de soufre, Benjamin Lacombe pose ses magnifiques illustrations, tout à la fois naturelles, raffinées, oniriques. Immenses ou miniatures, leur variété ne lasse pas : planches botaniques, dessins anatomiques ou juste esquisses des fées, et encore lettres, photographies personnelles du scientifique russe... Il suffit de regarder le gracieux chorégramme de l'helleboria pour avoir envie de danser, tandis que les grimaces de la rossolia font frissonner. Les tons sont profonds ou brumeux, et des jeux de découpages et de transparence achèvent de nous transporter en pleine forêt bretonne.
L'Herbier des fées aurait pu se contenter d'esthétisme, beau livre qu'on feuillette avec précautions. Ambitieux, il a su combiner intimement une histoire à suspens et passion au plaisir gourmand des yeux : l'équilibre est parfait.
Last but not least, l'ouvrage se décline en une version numérique pensée à part entière, univers animé complémentaire de la version papier (sortie prévue à noël 2011). L'une et l'autre devraient s'enrichir et composer un bonheur complet : la voluptueuse Fantasia refuse de s'en priver !
Mais comment ça je suis pas une fée ? C'est pas vrai !