Le Liberator - Richard Harland
Le Liberator
De Richard Harland
Traduit de l’anglais par Valérie Le Plouhinec
Hélium – avril 2011
15,90 euros
J’avais beaucoup aimé Le Worldshaker, gros pavé de steampunk savant se faire suffisamment psychologique et politique pour ne pas me rebuter. Ici, nous sommes toujours sur le navire-monde anglais, rebaptisé Liberator depuis la chute de l’impératrice Victoria. Col, autrefois jeune homme de la haute, est devenu un « ramolli » dont les anciens « immondes », maintenant à la tête du Conseil, se méfient. Heureusement, Col bénéficie encore de l’appui (l’amour ? il a du mal à le définir) de Riff. Mais entre en scène une jeune exaltée au lourd passé, Lye.
Après la monarchie et la révolution, voici donc venue la Terreur avec un grand T… Le fait qu’un mystérieux saboteur prévienne d’autres navires-mondes de la situation sur l’ex-Worldshaker va heureusement changer la donne et obliger tout le monde à une certaine solidarité. Une longue bataille finale aura lieu sur le bateau russe, le Romanov, dans une réédition de l’éclosion communiste.
Menée sans temps morts, l’intrigue m’a pourtant clairement ennuyée dans ses cent dernières pages : les rencontres armées successives, les stratégies d’un combat entre de multiples ponts et coursives… ce n’est pas mon truc ! J’ai préféré la première partie, plus lente, qui décrit la montée progressive du terrorisme révolutionnaire sous l’égide de Lye, Robespierre féminin : avec elle, les méchants changent de côté. L’épisode à terre, dans la station houillère, est un autre interlude divertissant, inspiré de l’esclavagisme des Noirs… Afin de suivre toutes les facettes de l’intrigue, le narrateur externe se centre habilement sur le jeune « ramolli » Col, observateur passif mais pas idiot. C’est dense, bien écrit et bien traduit.
Les personnages continuent à constituer à mes yeux le cœur du roman. Principaux ou secondaires, ils sont encore soignés aux petits oignons. Sephaltina Turbot en mariée folle, les lunaires Twillip et Septimus en sauveurs des Larbins, Gillabeth en grande organisatrice, etc, etc… Attachants, drôles, effrayants, ils huilent les rouages du navire-monde avec beaucoup de vivacité et d’émotions. On pourrait même parler de romantisme tant la relation entre Riff et Col est difficile, perturbée.
Ceci dit, je ne sais pas si un troisième tome, pourtant préparé, saurait encore me séduire : que peut-on dire d’autre à propos des navires-mondes ? Une porte reste ouverte sur la démocratie, mais on quitterait alors le steampunk pour l’utopie !
La couverture anglaise, nettement plus rude...
Et une interview de Richard Harland sur ActuSF.