la Mort j'adore saison 3 - Alexis Broca
La démone Clémence Volpi est coincée dans un bunker humide à Pluviors, en compagnie du journaliste Axel Braco, transformé en magnétophone vivant tournant au plafond. Elle raconte : la vie dorée à Los Angeles, ses cours de creative writing, la compagnie de sa goule Elo devenue accro à la philosophie, les virées express à Paris pour voir le beau Ronald… Tout allait (enfin) pour le mieux, jusqu’à ce que Sa Très Haute Bassesse émerge des enfers et missionne Clémence d’une entreprise tordue où elle sauverait l’humanité… en signant sa propre perte.
Assidue à des cours dispensés par une fumeuse auteure de best-sellers, Clémence se pique de littérature : elle apostrophe l’éditeur, soigne ses effets d’attente, envisage des constructions et chapitrages… bref nous livre tout un travail d’écrivain, avec la verve et la spontanéité un peu vulgaire qu’on lui connaît. Sans oublier un brillant second degré : « Bref, comme l’a écrit une journaliste brillante de Cosmopolitan, mes romans se situent à mi-chemin de la satire selon Wilde et du réalisme engagé à la Emile Zola. », nous dira ainsi la professeure Plum Lorshnell à propos de son roman Blonde, New-yorkaise et divorcée (p. 59)... Plum Lorshnell qui propose également « un petit exercice, afin de juger de votre personnalité d’écrivain : racontez-moi votre dernière séance de shopping en 7 000 caractères. Vous avez deux heures. » (p. 60).
Clémence s’emberlificote régulièrement dans des digressions et des pauses, revient aux faits principaux pour mieux se perdre dans une transe à travers la Préhistoire censée lui rappeler une vie antérieure. « Ca craint, bordel… Mon intrigue part dans tous les sens, aucune cohésion, aucune ligne narrative pour cimenter le tout ; si Ronald était là, il dirait qu’on croirait l’équipe de France. » (p. 66). Le personnage d’Elo prend de l’ampleur et de l’indépendance, amatrice de philosophie à la sauce sexy et démone apprentie qui hurle ses incantations en R&B. Le lecteur a intérêt à s’accrocher, ou plutôt à se laisser porter par les aventures abracadabrantesques de Melle Volpi, d’une originalité folle et d’un irrésistible humour sanglant. De manière assez étonnante, notre narratrice ne se révèle pas si démone que cela, puisque, certes un peu forcée, elle fera le choix de suivre son destin pour sauver l’homme 1/ d’un désastre écologique programmé 2/ d’un catastrophique président des Etats-Unis. On n’imagine pas forcément de saison 4, mais Alexis Broca a définitivement renouvelé (pour ne pas dire complètement retourné) le roman fantastique pour adolescents : une entreprise réjouissante et machiavélique en soi !
La Mort, j’adore ! saison 3
D’Alexis Broca
Sarbacane – collection Exprim’ – janvier 2011
16 euros
J’ai un autre roman « chouchou » de cet auteur, qui précède La Mort j’adore ! : Je sais que je ne suis pas seul (Sarbacane, collection Exprim’, 2007).